La France compte plus de 10 000 start-up, qui ont au total levé un peu plus de 1,6 milliard d’euros en 2017.
Ces opérations ont indéniablement été menées de main de maître par des avocats chevronnés. Faut-il forcément attendre une levée de fonds pour être bien accompagné juridiquement ? A quel moment le juridique devient-il stratégique ? Le secteur d’activité a-t-il un impact ? Quand internaliser la fonction juridique ?
C’est à ces questions que nos intervenants Pierre Landy, Directeur juridique de Ledger (à gauche), et Adrien Perrot, Associé de A.P.E avocats (à droite), ont eu le plaisir de répondre lors de notre dernière Matinale.
1. Start-up : retour sur le concept
Bien plus qu’une simple « jeune pousse », une start-up doit – pour être qualifiée comme telle – réunir quatre conditions d’après l’historien des entreprises Patrick Fridenson :
- Forte croissance potentielle
- Technologie nouvelle
- Besoin d’un financement massif
- Marché nouveau
Cela ne dépend ni de la taille, ni de l’âge, ni du secteur d’activité. Sont en effet encore définissables comme start-up Ledger – dont le chiffre d’affaires était pourtant de 45 millions d’euros – ou encore un certain Twitter – créé en 2006, mais encore en recherche d’un business model. A noter cependant que la première a atteint le statut de « scale-up » – ayant bénéficié d’une levée de fonds – et la seconde celui de « licorne », c’est-à-dire avec une valorisation supérieure à un milliard de dollars.
2. Un périmètre au-delà du juridique
Le périmètre d’intervention du juriste ou avocat de start-up est large par définition : contrats, corporate, gouvernance, M&A, protection de la propriété industrielle, droit du travail, relations avec les investisseurs et les banques, product compliance…
L’avocat est souvent le seul conseil externe des dirigeants, c’est pourquoi le rôle de l’avocat « va au-delà du juridique » selon Adrien Perrot. Il ne s’agit pas seulement de mettre en place les statuts, les contrats et les process mais aussi d’intervenir en tant que véritable conseil stratégique. C’est avant tout de l’œil averti de l’avocat ou du juriste dont a besoin le dirigeant. C’est pourquoi être juriste en start-up suppose d’avoir une vue d’ensemble sur tous les projets, d’être impliqué dans les décisions stratégiques et d’avoir parfois un rôle de business developer. Même s’il faut accepter de ne pas être écouté parfois !
3. Internalisation du juridique : quel est le moment clé ?
La décision d’internaliser la fonction juridique au sein d’une start-up relève d’un choix propre à chaque dirigeant. Plusieurs facteurs peuvent influer sur l’internationalisation :
- le secteur d’activité : selon Adrien Perrot « certaines sociétés doivent décider rapidement d’internaliser. C’est le cas lorsque leur survie dépend du juridique notamment dans un contexte dans lequel une innovation peut engendrer des problématiques règlementaires », ou encore lorsqu’il s’agit d’une fintech.
- la levée de fonds : Pierre Landy constate que « les start-up américaines se dotent plus rapidement d’un directeur juridique, qui gère le quotidien, le M&A et le business development. En France, c’est généralement après la levée de fonds que le board décide de recruter un juriste ». Il ajoute que « l’idéal est d’être accompagné avant par un avocat internalisé, c’est-à-dire dédié à la société, puis de recruter ensuite ».
- l’IPO, mais nos deux intervenants déconseillent d’attendre de voir se profiler une telle opération pour se faire accompagner. Selon Pierre Landy, « le juriste a énormément de choses à mettre en place en amont, et il ne pourra pas gérer cette opération s’il n’est pas déjà intégré au sein de la start-up ». Il est en effet nécessaire qu’il anticipe les risques.
4. Quel meilleur juriste en start-up ?
Outre les compétences juridiques indéniablement requises, le juriste en start-up doit répondre à un certain nombre de soft skills : créativité, réactivité, leadership, agilité, pédagogie, adaptabilité.
Pierre Landy ajoute qu’il est nécessaire d’avoir « envie de créer, car on part d’une page blanche » et « un vrai sens de l’humour ». Le quotidien en start-up n’est pas un long fleuve tranquille !
Autre qualité requise : la curiosité, primordiale aux yeux d’Adrien Perrot.
Nous rencontrons bon nombre de juristes débutants venant de start-up. Si leur rémunération représente un moindre investissement pour la start-up, recruter un profil expert permet de mieux anticiper les risques et d’être une meilleure caution pour les investisseurs.
« Intégrer un directeur juridique ne permettra pas de faire l’impasse sur le recours aux avocats, qui sont complémentaires aux juristes internes », explique Pierre Landy, qui pourtant en compte neuf dans son équipe !
Il souligne également l’importance du rattachement du juriste, qui doit reporter au CEO, mais aussi être membre du CODIR. Le juriste devra avoir une vraie liberté de parole, afin de ne pas être uniquement un business partner mais un véritable trusted advisor.
Pour plus d'informations, n'hésitez pas à contacter les organisatrices de cette Matinale :
Audrey Déléris, Manager - audreydeleris@fedlegal.fr
Yasmine Habchi, Manager - yasminehabchi@fedlegal.fr